Situées dans la Province du Bam, dans la Région du Centre-Nord du Burkina Faso, les communes de Kongounsi et de Tikaré subissent de plein fouet les effets de la crise sécuritaire qui depuis 2010 sévit au Sahel. Ces effets se traduisent en chocs exogènes multiples qui entraînent une reconfiguration sociale conflictuelle dans ces deux communes. Partant, ils accentuent  la vulnérabilité des communautés et fragilisent simultanément les institutions locales.

Des séries de rencontres en entretiens individuels et focus group réalisées  par l’équipe i-APS avec les acteurs socioprofessionnels et économiques locales, les jeunes, les femmes, les légitimités traditionnelles et religieuses ont permis de dégager ces facteurs de chocs externes comme cause des déséquilibres, de l’augmentation des tensions sociales et de la déstabilisation des structures locales. Ces facteurs sont :

Le surpeuplement des communes :

il ressort qu’ au cours de ces trois dernières années ces deux communes ont connu une croissance extraordinaire de leurs populations qui ont pratiquement doublé, voire triplé pour ce qui concerne la commune de Kongounsi. Des déplacements massifs et récurrents des populations des communes voisines aussi bien de la province du Bam que celles du Sahel (Soum et Seno) du fait des attaques des groupes extrémistes violents. Ainsi la présence massive des populations déplacées internes (PDI) entraîne une forte pression sur les services sociaux de base augmentant les problèmes de sécurité, alimentaire, de logement, de disponibilité de terres arables. Cette présence massive est également source de tensions quotidiennes entre les autochtones et ces allochtones. 

L’orpaillage traditionnel :

Le surpeuplement de ces communes est dû également à l’arrivée massive des migrants économiques présents dans l’espoir de faire fortune dans l’orpaillage traditionnel.

Le vol qualifié :

la présence des mines artisanales crée une économie locale florissante sur fond de transactions de flux massifs d’argent. Or ces communes ne sont pas pour le moment couvertes par les forces de sécurité nationale. Ainsi il s’est développé une prolifération du grand banditisme, des vols avec des armes d’assaut. Cette criminalité de plus en plus grandissante trouble la quiétude et met en danger la vie des communautés.

La dépravation des mœurs :

la présence des mines d’or artisanales, l’insécurité qui ne faiblit pas du fait des nébuleuses djihadistes et son corollaire de déplacement des personnes ont entraîné la surpopulation des communes.  Parallèlement, il s’est développé, la vente d’alcools de toutes sortres, de circulation des stupéfiants et la prostitution. Cette perversité grandissante, qui n’existait pas dans ces communes,  accentue les tensions sociales. Elle crée une crise de valeur au sein des communes. 

Les préoccupations rapportées par les personnes que nous avons interrogées nous donnent un aperçu des luttes des communautés de la région Centre-Nord du Burkina Faso. Face à ce qui semble être une triple crise (sécuritaire, humanitaire et de la faim), les personnes vulnérables de cette région ont désespérément besoin de soutien pour assurer la paix et la cohésion sociale. Les autorités communales et les structures étatiques décentralisées semblent dépassées par la situation et peinent à apporter des réponses adéquates. Un soutien visant à atténuer les risques et les menaces pour la paix et la cohésion sociale, à mettre en place des systèmes agricoles et alimentaires résilients et durables et à aider les communautés à s’adapter à l’évolution du contexte pourrait avoir un impact substantiel et répondre aux besoins des populations vulnérables, des structures communautaires et des organes de gouvernance locaux.